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Témoignage des accompagnants spirituels à l'hôpital d'Erasme-Bordet - Cathobel

Un très bel article publié sur Cathobel le 15 décembre 2025 :

À l’hôpital Erasme et à l’Institut Jules Bordet, Michèle de Villers, Valérie Gevaert et Grégoire Barthélemy exercent une mission d’aumôniers auprès des patients. Ils témoignent d’un accompagnement spirituel fait d’écoute et de présence au cœur des épreuves de la maladie et parfois de la fin de vie.

Aller à la rencontre : une pastorale de la présence

À l’admission, chaque patient peut demander la visite du service d’aumônerie via un formulaire. Dans les faits, peu font spontanément cette démarche.

« Nous allons surtout à la rencontre des gens grâce au personnel soignant, explique Grégoire. » Infirmières, médecins, kinés… ce sont eux qui repèrent les patients particulièrement éprouvés et qui signalent à l’aumônerie qu’il serait bon de leur rendre visite.

« Notre travail repose principalement sur les relations de confiance et de respect tissées avec l’équipe médicale, poursuit Grégoire. Avec leur expérience, les infirmières savent reconnaître qui a besoin de parler et d’être écouté. Nous pouvons alors offrir quelque chose de précieux : du temps, et la disponibilité de nous asseoir auprès du patient, tout en laissant, bien sûr, la possibilité de refuser la rencontre. »

Pour Michèle, l’accompagnement spirituel n’est jamais une démarche d’en haut :

« L’accompagnement spirituel, ce n’est pas nous qui venons du haut de notre grandeur et de notre savoir. C’est un échange, un compagnonnage, un chemin ensemble. »

Grégoire résume ainsi sa manière de se présenter :

« Je dis au patient : vous êtes unique, je suis unique, on va faire un chemin unique à nous deux. »

Une anecdote l’a particulièrement marqué : un stagiaire vient visiter un monsieur très affaibli. Il lui demande comment il va, le patient ne parvient qu’à émettre un son, et la visite se termine au bout d’une minute par un simple « bon courage ». Le lendemain, sur le conseil de Grégoire, le stagiaire revient, s’assied, prend la main du patient. « Le monsieur a alors pleuré parce qu’il a senti qu’il y avait quelqu’un qui avait pris le temps de s’asseoir à côté de lui. Parfois, nous ne sommes pas là pour parler, mais pour offrir une simple présence. Vu de l’extérieur, cela peut sembler une perte de temps, mais pour ce monsieur, ce fut profondément touchant. »

Accompagner le sens de la vie, jusqu’au bout

À l’hôpital, les questions existentielles ne restent pas théoriques. Elles surgissent au fil des diagnostics, des rechutes, des annonces difficiles. « Nous travaillons vraiment sur le sens de l’existence, explique Grégoire, parce que les personnes sont en fin de vie ou traversent des périodes de santé compliquées. Quelqu’un sait qu’il va mourir d’un cancer. La question du sens de la vie l’habite à fond : comment garder le positif, comment être reconnaissant pour ce qui a été bon ? »

Michèle, elle, parle d’un accompagnement marqué par la foi en la Résurrection :

« En arrière-plan de notre travail d’accompagnement spirituel chrétien, il y a la dynamique résurrectionnelle : accompagner le patient, à son rythme, dans la traversée vie-mort-résurrection. »

Elle fait le parallèle avec le Triduum pascal : le Vendredi saint de la souffrance, le Samedi saint de latence et de maturation, et la Résurrection qui ne peut être forcée.

« Si quelqu’un nous dit qu’il va mal, nous pourrions être tentés de le réconforter trop vite ou d’apporter des réponses spirituelles toutes faites. Mais cela peut contrecarrer le travail de transformation intérieure. Il s’agit de rester dans la posture de l’accompagnateur : être avec lui tout au long de la descente et du temps d’attente, sans précipiter la remontée. »

Valérie partage la même prudence : « Je me rends compte que si jamais je viens avec des réponses toutes faites, je perds le contact avec la personne. Parfois, le patient nous pose des questions, mais il vaut mieux retourner la question. »

Ses débuts à l’hôpital ont été marqués par un choc :

« Mon premier jour de stage, mes yeux ne voyaient que de la souffrance. Heureusement, la journée s’est terminée au service de maternité, ces naissances étaient une vraie bouffée d’air frais. Puis j’ai encore vécu des expériences très bouleversantes et j’ai envisagé d’arrêter. Mon maître de stage m’a encouragée à ne pas renoncer trop vite. Après une pause, je suis revenue, et c’est là que j’ai commencé à me sentir vraiment bien. Aujourd’hui, quand je visite un patient, je ne vois presque plus la maladie, je me focalise sur la personne. Les rencontres sont souvent très enrichissantes. »

Prier avec et pour les patients

L’accompagnement spirituel se nourrit aussi de prière. À Erasme, une initiative proposée par les Dominicains a vu le jour : les équipes du Rosaire.

Le principe : de petits groupes où les membres s’engagent à prier chaque jour une dizaine de chapelet en méditant un mystère.

« C’est très beau parce que c’est un tout petit engagement, souligne Michèle. Ce n’est pas une prière pour une élite. Il y a une dimension de communion avec les autres malades et des personnes du monde entier qui prient avec Marie. »

Dans le quotidien de leur mission, les aumôniers puisent également à la source de la Parole de Dieu.

« Tous les matins, nous commençons en équipe par un temps de prière, avec la lecture du jour, explique Valérie. On approfondit ensemble et cela nous donne des pistes pour vivre nos rencontres. »

Avec le temps, elle a appris à davantage confier les patients au Seigneur :

« Avant, j’avais tendance à trop m’en faire. De plus en plus, je remets les personnes entre les mains de Dieu. »

Enfin, la mission se vit aussi dans le dialogue avec d’autres confessions. Les aumôniers catholiques sollicitent, lorsque c’est souhaité, un prêtre orthodoxe, un ministre protestant ou un représentant d’une autre religion. Michèle rend régulièrement visite à des patients musulmans : parfois on parle de tout et de rien, souvent de foi. « Il nous arrive de comparer nos manières de croire, dit-elle. Il nous est même arrivé de prier ensemble, côte à côte, chacun invoquant Dieu par Son Nom. »

Au fil des couloirs et des ascenseurs, au chevet des malades ou en salle de réunion, cette « pastorale hospitalière » dessine ainsi un visage de l’Église tout en discrétion : une Église qui écoute, qui prend le temps, qui accompagne, et qui confie chaque vie au Seigneur, jusque dans les heures les plus fragiles.

Pour retrouver l'article original : Aumôniers à l’hôpital Erasme-Bordet : une pastorale des périphéries - CathoBel

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